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Une information sur cette démarche peut aussi être portée auprès du médical et de notre autorité hiérarchique, M. Matone
Mme la Rectrice de l’académie de Grenoble,
S/C M. Le Proviseur du lycée Champollion
7 Pl. Bir Hakeim,
38000 Grenoble
Mme la Directrice des études et de la pédagogie de la FSEF
Fondation Santé des Étudiants de France
8, rue Émile Deutsch-de-la-Meurthe
75014 Paris
Copie aux représentants syndicaux des personnels enseignants de la FSEF
et aux organisations syndicales représentant les personnels de l’académie de Grenoble
Ce courrier est, pour tous ses signataires, l’occasion d’exprimer aussi clairement que possible leur inquiétude, leur insécurité professionnelle et psychologique, et leur mal-être au travail, qui pour beaucoup d’entre eux, en nombre croissant, compromet leur équilibre psychique personnel. Depuis deux années désormais, une situation douloureuse de conflit entre la direction des Etudes et les personnels de l’Unité soins Etudes s’est installée dans la durée, au point de compromettre le fonctionnement de la structure au service des patients-élèves d’une part, et de mettre en danger la santé des personnels d’autre part.
Face à cette situation les personnels signataires de ce courrier éprouvent un sentiment d’abandon et d’invisibilité : de nombreuses tentatives de conciliation en interne ont été menées depuis deux ans par les personnels. La venue d’un Inspecteur Santé et Sécurité au travail au mois de mars 2021 a permis un premier diagnostic alarmant. Un audit mené à la demande de l’autorité académique au mois de juin 2021 sous l’égide de Monsieur Durand, directeur des Etudes de la Fondation, de Madame Coupat, Proviseur Vie Scolaire de l’Académie de Grenoble, et Monsieur Josserand, psychologue du travail auprès de la Rectrice de l’Académie de Grenoble, a redoublé ce diagnostic, mais n’a reçu à ce jour aucune traduction concrète dans la vie de l’établissement. Enfin, une médiation tenue le 21 octobre entre représentants des personnels et direction, en présence Madame Claudel, adjointe à la direction des Ressources humaines du Rectorat de Grenoble, et de Monsieur Josserand, psychologue auprès de Madame la Rectrice, s’est achevé par l’aveu de la directrice des Etudes qu’elle ne percevait pas l’existence d’un problème global ni son urgence, soit par un échec patent.
Rappel des missions pédagogiques et de la spécificité du travail à l’Unité Soins-Etudes
L’Unité Soins-Etudes scolarise des adolescents et de jeunes adultes en situation de détresse psychologique grave. D’autres pathologies, en particulier des troubles du comportement alimentaire, se greffent souvent sur les pathologies psychiatriques pour aggraver la détresse de ces adolescents.
Les jeunes hospitalisés sont issus d’un long parcours de décrochage, parfois de plusieurs années, ils ont le plus souvent vécu des situations dramatiques d’isolement social et de rupture familiale. Beaucoup d’entre eux ont réalisé une ou plusieurs tentatives de suicide.
Pour toutes ces raisons, ils sont accueillis, tout au long de l’année, à l’Unité Soins-Etudes à l’issue d’une ou plusieurs périodes de déscolarisation, et l’Unité Soins-Etudes leur propose une re-scolarisation adaptée et progressive, adossée à un parcours de soins.
C’est là le sens du Soins-Etudes, à l’intersection entre la thérapeutique et la scolarité, la scolarité ayant sa fin propre (acquisition de savoirs et savoir-être, passation d’examens, en particulier le baccalauréat) tout en étant un puissant outil au service du soin. Dans ce cadre, les équipes enseignantes travaillent en étroite collaboration avec les équipes médicales et soignantes : médecins, infirmeries, psychologues, cognitivistes, ergothérapeutes, et avec les services d’assistance sociale.
La prise en charge de ces élèves est susceptible de varier beaucoup entre leur accueil à l’USE et les différentes phases de leur scolarité et de leur thérapeutique. L’adaptation et la réactivité des équipes sont indispensables et appartiennent à leur culture professionnelle dans le cadre d’un suivi régulier des évolutions qui marquent le parcours de ces jeunes.
Plusieurs sites composent la structure, dont chacun accueille un public spécifique, avec une pédagogie différenciée et adaptée.
Dans l’ensemble des sites, c’est l’adaptation de la pédagogie au patient-élève qui prévaut, et coordonnateurs, CPE, professeurs principaux et équipes pédagogiques ont développé une culture du travail collectif entièrement centrée sur le jeune patient-élève dont la scolarité est un élément essentiel du dispositif thérapeutique.
Insécurité et souffrance au travail
Dans ce contexte très particulier et très exigeant qui caractérise nos missions d’enseignants, de coordonnateurs et de CPE, nous constatons que nos conditions de travail actuelles compromettent leur accomplissement auprès de nos patients-élèves. C’est le mode d’organisation, de gouvernance, et de communication en vigueur actuellement à l’Unité Soins-Etudes qui est responsable de ce malaise et de ces difficultés qui vont croissant de mois en mois, généralisant une insécurité chronique pour les personnels et une inquiétude profonde pour l’intégrité de la structure Unité soins-études.
Nous déplorons et nous souffrons ainsi d’une désorganisation de notre travail par défaut de cadre, d’anticipation, et de représentation.
L’organisation du travail collectif tout entière souffre d’une forme de pilotage extrêmement fragile. La porosité des prérogatives se traduit trop souvent par une délégation des tâches de direction vers les personnels : les coordonnateurs sont alors placés de fait en position de personnels de direction pour la structure dont ils ont la responsabilité. Les professeurs principaux et CPE assurent à eux seuls le suivi des élèves, le contact avec les familles, le lien avec le médical, l’animation et la préparation des conseils de classe, et le travail d’orientation ou de ré-immersion des patients-élèves. Ces missions essentielles, ne reçoivent pas suffisamment l’appui de la direction en matière de pédagogie. De même, le travail des secrétariats est devenu source de profonde souffrance à force de n’être pas guidé, dirigé, anticipé, et de ne pas faire l’objet de directives explicites. Les secrétaires se trouvent ainsi en position de devoir veiller, alerter, et finalement faire à la place d’une direction qui semble toujours dépassée. Il en va de même du service Vie scolaire dont les tâches sont toujours plus lourdes et relèvent désormais autant de la gestion réseau que de la vie scolaire à proprement parler. Pour tous, administratifs et équipes pédagogiques, la charge mentale et les doutes quant à l’opportunité de sortir ainsi de ses attributions sont devenus une difficulté quotidienne qui entraîne une fragilité pour la structure. La méconnaissance du travail réalisé par les uns et les autres ne permet pas à la direction de prendre la mesure du décalage entre sa pratique et les attentes légitimes des personnels qui lui sont subordonnés.
Ce défaut d’organisation rend toujours plus difficile le travail collectif pourtant rendu nécessaire par l’éclatement de notre structure pédagogique entre de multiples sites. Ces sites obéissent à des logiques variées au sein de la problématique globale du soins-études, et s’adressent à des publics divers, une diversité qui exige une concertation renforcée des équipes et des coordonnateurs, sous l’égide et à l’initiative de la direction.
Il en va de même à l’échelle de la structure tout entière : tout au long des deux années écoulées, les équipes enseignantes ont ainsi travaillé à de nombreux projets en lien direct avec les questions nombreuses posées par l’évolution du contexte du soins-études : nouvelle grille horaire valorisant les phases d’accueil, de remédiations, de tutorat ; ré-immersion des élèves dans l’ordinaire et construction du lien réticulaire avec les établissements ; missions évolutives des professeurs référents ; évaluation du patient-élève et réforme du baccalauréat… Trop peu des documents de travail circonstanciés produits par les équipes ont fait l’objet d’un document de synthèse et de référence, susceptible d’être partagé par tous, et permettant d’acter des décisions dans la pratique quotidienne des uns et des autres.
Cette forme de pilotage se traduit par un projet d’établissement devenu progressivement illisible, qui rend les choix stratégiques très difficiles, comme il est arrivé en 2020-2021 au moment d’arrêter la dotation globale horaire. De tels choix exigent en effet, à moins d’être présentés comme de pures contraintes comptables, qu’un projet d’établissement global soit précisément décliné site par site et assorti d’une réflexion de fond : quels élèves ? quels projets ? Quelles modalités de retour dans le système éducatif secondaire ou d’insertion dans le supérieur ? La présentation de la dotation globale par la direction n’a pas davantage favorisé la confiance des équipes : nombreux projets soumis à des variations arbitraires au fil du temps, opacité quant à l’emploi des heures supplémentaires, gestion des postes et des blocs moyens provisoires aboutissant à des besoins inférieurs aux heures postes implantées, équité problématique dans la rémunération des missions de coordonnateurs et des projets. Une réunion consacrée à la préparation de rentrée a été brutalement et unilatéralement interrompue au mois de juin 2021 par la direction, laissant les équipes dans une complète incertitude pour construire des répartitions de services que la direction a pourtant exigées. La demande formulée lors de l’audit de la fin du mois de juin de retravailler en urgence la répartition des moyens a été ignorée lors de la restitution du 6 juillet. Les débats nécessaires autour des exigences du soins-études (rôle des langues dans le projet thérapeutique, par exemple) n’ont pas pu aboutir. Des enseignements évaluables au baccalauréat comme l’Enseignement moral et civique ne sont pas inscrits, cette rentrée 2021, à la grille horaire des élèves ou dans l’emploi du temps des professeurs, ces enseignements n’ayant pas été prévus lors de la répartition faute d’une prise de connaissance suffisante des textes et règlements d’examen.
De tels flottements et de telles indécisions se traduisent aussi par une invisibilité institutionnelle de notre structure, faute qu’elle soit défendue énergiquement et avec lisibilité auprès des instances et institutions dont nous dépendons. Notre structure est ainsi de moins en moins connue et reconnue : la suppression l’an passé d’un temps partiel d’AESH, la suppression du poste de documentation et enfin la suppression possible – après un détachement d’un an d’un collègue - du poste de CPE de la clinique en 2022-2023, témoignent de cette faible connaissance de nos spécificités. La spécificité de ces postes et les compétences très particulières des personnels qui les occupaient n’ont pas été, à nos yeux, suffisamment mises en valeur auprès du Rectorat de l’Académie de Grenoble. Un tel défaut dans la représentation de notre établissement nous inquiète aussi dans la perspective de la restructuration des services hospitaliers et du projet architectural qui ont commencé à la Clinique. Les préconisations contraignantes de l’Agence régionale de Santé auront des impacts majeurs sur le soin-études, qui rendent nécessaire de repenser en profondeur le projet d’établissement. Ces évolutions exigeraient que les ambitions d’une scolarité ambitieuse au service du soin soient exprimées avec force par une direction qui porterait un projet construit et partagé. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, où la direction des Etudes semble être considérée comme une simple courroie de transmission de décisions et réflexions prises et menées par d’autres instances.
Communication insuffisante, perte de confiance et risque psychologique et sanitaire
L’ensemble de ces difficultés conduit aujourd’hui à une situation bloquée. La communication des équipes avec la direction est devenue très difficile, rendant impossible des relations professionnelles confiantes et porteuses d’un projet collectif.
La communication entre personnels et direction des études est entachée par une confusion systématique entre les registres personnel et professionnel. Les échanges institutionnels (réunions de service, conseils pédagogiques) et, dernière en date, la médiation du 21 octobre démontrent que la direction ne parvient pas à considérer ses nombreux interlocuteurs successifs comme des représentants qui portent des demandes collectives. En matière de communication toujours, de nombreux courriers de collègues restent sans réponse, alors même que ces réponses sont des plus importantes et urgentes, impliquant même l’organisation du service ou les carrières des personnels. En conséquence, de nombreux projets portés par les équipes n’avancent pas, ou sont portés à bout de bras par leurs promoteurs, qui s’épuisent jours après jours.
Les nombreuses propositions et demandes faites par les équipes, depuis deux ans, de médiation et d’amélioration du régime de cette communication? n'ont pas réellement abouti. Les équipes attendent de leur direction qu’elle joue un rôle de pivot, de ressource institutionnelle et pédagogique, qu’elle donne du sens au projet soins-études tel qu’il se redessine pour les années à venir afin de porter et valoriser une philosophie éducative commune auprès de nos interlocuteurs institutionnels, des patients et de leurs familles.
Tout au long de l’année 2020-2021, des personnels ont bénéficié d’arrêts de travail en lien explicite avec la dégradation du climat à l’Unité Soins-études. A la fin de l’année scolaire, certains ont demandé et obtenu d’être provisoirement déplacés sur un autre poste afin de retrouver une certaine sérénité professionnelle. Cette série se poursuit malheureusement en ce début d’année 2021-2022, où plusieurs personnels envisagent de demander arrêts de travail, mesure d’accident de service, ou déplacement d’urgence. Des personnels arrivés sur des postes de l’Unité en septembre 2021 ont d’ores et déjà indiqué leur intention de quitter la structure dès l’an prochain, faute d’accompagnement à la prise de poste, et de reconnaissance pour les missions exigeantes qu’ils effectuent.
En définitive, c’est la confiance de l’équipe dans la direction qui est aujourd’hui compromise. Aucune des conditions d’un travail fructueux ne sont plus réunies par les modalités de l’actuel pilotage, et le sens collectif de notre travail nous échappe, malgré notre engagement individuel.
Sentiment d’abandon et indifférence de nos institutions de tutelle
Nous avons exprimé à de nombreuses reprises, et auprès de nombreux interlocuteurs institutionnels notre besoin impérieux et urgent des éléments énumérés dans ce courrier : cadre formel permettant à chacun de situer ses missions dans une organisation globale, anticipation à brève échéance, stratégie à moyen terme, capacité à incarner un projet soins-études, communication adaptée en interne et en externe, transparence et sincérité des choix autour d’un projet réfléchi et partagé en commun.
Malheureusement, force est de constater que ces démarches nombreuses, loyales et justifiées n’ont pas pour l’instant provoqué de réponses visibles de la part de nos institutions de tutelle.
La venue de Monsieur Gonon, Inspecteur santé et sécurité au travail, le 24 mars a été l’occasion pour lui de constater l’état de délabrement des relations entre personnels et direction, et le risque sanitaire et social qui pèse sur les personnels. Le 24 juin 2021, a eu lieu un audit, déjà rappelé au début de ce courrier, mené par Madame Coupat, Proviseur Vie Scolaire de l’Académie de Grenoble, Monsieur Durand, directeur des Etudes de la Fondation, et Monsieur Josserand, psychologue du travail auprès de la Rectrice de l’Académie de Grenoble. Au cours de cet audit, de nombreux personnels ont été entendus à différents titres (enseignants, personnels administratifs, CPE, professeurs principaux, coordonnateurs), et les auditeurs ont pris la pleine mesure des dysfonctionnements qui grèvent le fonctionnement de la structure et du malaise et du mal-être profond où se trouvaient les personnels entendus.
Cet audit dans lequel les personnels plaçaient beaucoup d’espoir n’a donné lieu le 6 juillet qu’à une restitution orale, par Madame Coupat et Monsieur Durand, devant une partie des personnels élus de la CPE ou exerçant des fonctions particulières. Depuis, les conclusions énoncées par Madame Coupat et Monsieur Durand le 6 juillet n’ont pas donné lieu à quelque mise en œuvre que ce soit. Les conclusions écrites de l’audit n’ont pas été communiquées à l’établissement et à ses personnels. Monsieur Durand, comme Madame Coupat, ont cessé d’exercer les fonctions qu’ils exerçaient au moment de l’audit, privant ainsi les personnels de deux interlocuteurs qui pouvaient constituer une garantie de continuité et de suivi des décisions et préconisations de l’audit. Madame Beaurepaire, qui a succédé à Monsieur Durand au poste de directrice des Etudes de la Fondation, a indiqué aux personnels représentants rencontrés le 5 octobre que le changement de statut prenait du temps et qu’il n’était pas inscrit aux priorités urgentes de l’agenda de cette année.
L’engagement cardinal pris par les auditeurs lors de la restitution du 6 juillet envisageait la transformation de l’Unité soins-études, qui n’est actuellement qu’une annexe du Lycée Champollion, en un Etablissement public local d’enseignement. Cette transformation institutionnelle devait avoir pour conséquence directe le changement de direction, puisque Madame Richelmy, actuellement adjointe de direction du proviseur du Lycée Champollion, devrait quitter un poste voué à être occupé par une équipe de direction autonome. A ce jour, nous n’avons aucune information sur cette évolution dont la perspective semble même s’éloigner dans un avenir éventuellement très lointain.
La médiation tenue le 21 octobre, entre des représentants des personnels et la direction, sous la supervision de Madame Claudel, adjointe au DRH de l’Académie, et Monsieur Josserand, psychologue du travail, n’a pas davantage rassuré les représentants des personnels quant à la pérennité des engagements pris le 6 juillet, et à une transformation statutaire de la structure engageant le changement de direction à échéance de cette année scolaire 2021-2022.
Ces circonstances nourrissent chez les personnels de l’Unité soins-études le vif sentiment d’être abandonnés par l’institution dont ils dépendent après avoir pourtant consacré beaucoup de temps, d’énergie, et d’implication à ces tentatives de résolution qui tardent à porter des effets. Dans ce contexte difficile, et qui s’inscrit maintenant dans la longue durée, nous exprimons avec force, une nouvelle fois, notre malaise, et surtout notre inquiétude quant aux conséquences que cette situation pourrait avoir sur notre structure et sa pérennité. C’est au nom de notre conviction profonde d’être utiles aux jeunes patients-élèves qui nous sont confiés que nous dressons cet état des lieux inquiet et pessimiste. Nous souhaitons que le soins-études puisse continuer à vivre à l’USE, comme réponse adaptée aux situations dramatiques des patients-élèves que nous accueillons, et comme pédagogie humaniste ancrée dans les valeurs de la FSEF, et dans celles de l’Education nationale.